Younès Adli, écrivain et universitaire, vient de publier son sixième ouvrage. Intitulé, Les efforts de préservation de la pensée kabyle aux XVIIIe et XIXe siècles, cet essai, dont le tome II est en chantier, présente les mécanismes des relations sociales en Kabylie un siècle avant la colonisation.
L’auteur décortique la société kabyle, se basant sur des travaux, des écrits authentiques et des entretiens avec des personnages en haute et en basse Kabylie qui ont un rôle prépondérant dans la préservation de la mémoire collective. Plusieurs aspects de la vie dans cette région d’Algérie ont été examinés par l’auteur : organisation politique, place de la femme dans la communauté et perception de la religion. A travers son travail qui repose sur des standards scientifiques, Younès Adli ambitionne de mettre en valeur la «pensée kabyle si peu connue, et pourtant si typique dans le monde musulman». Tout au long des 254 pages de l’ouvrage, l’auteur développe les résultats de ses recherches concernant la pensée kabyle, qui, selon lui, est portée par des hommes de culte, tels que Houcine El Warthilani (1710-1779), qui ont défendu la sainteté locale de l’Islam aux dépens de l’hégémonie des prédicateurs orientaux.
Outre l’adaptation de la pratique religieuse aux réalités sociologiques de la Kabylie, l’auteur de l’ouvrage consacre une partie consistante à l’organisation sociale et politique, le droit coutumier et la question de la déshérence de la femme qui provoque d’âpres débats au sein des sociologues et des féministes. Younès Adli explique que la femme n’hérite pas la terre. Cette pratique, explique-t-il, était dans un souci de préserver l’identité kabyle qui faisait face aux coups de boutoir des Turcs, notamment Mohamed Eddebah (l’égorgeur), caïd du Sébaou (vallée de Tizi Ouzou). L’intérêt de cet ouvrage, il le doit surtout aux explorations multiformes que son auteur a fait dans la société, objet de l’étude. «Sur le plan sociopolitique, la Kabylie était parvenue à se donner la possibilité d’une gouvernance sans Etat. Cette organisation politique était accompagnée d’un système législatif élaboré au niveau de chaque microcosme villageois, et qui a permis aux djemaâs de se doter d’un pouvoir et d’une puissance civile et morale, plutôt que militaire et répressive.» Un livre à lire !
Macahu entre les lignes avec younes adli